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« Ils quittèrent la stanitsa à l’aurore d’une matinée diaphane quand, au premier soleil, les Crêtes d’une blancheur éclatante se dressaient si prochaines, avec leurs replis bleu sombre et chacune de leurs échancrures si visibles qu’un homme inaverti eût pensé les atteindre en deux heures de cheval. »

Ainsi débute Août 14 1, le premier « noeud » de l’immense fresque (inachevée) qu’Alexandre Soljénistsyne a consacrée aux convulsions vécues par la Russie entre le début de la guerre de 1914-18 et la Révolution d’octobre 1917.

Cette phrase m’a toujours fait rêver, peut-être parce qu’elle n’annonçait pas uniquement un fleuve littéraire, mais qu’elle constituait également une invitation au voyage à travers l’immensité russe. Quel souffle faut-il pour démarrer un roman de cette façon, quelle certitude d’avoir en réserve une substance littéraire inépuisable, quelle confiance en soi, quelle ambition également !

1. Alexandre Soljénistsyne, La Rouge rouge. Premier noeud : Août 14, Paris, Fayard, 1984, traduit du russe par Jean-Paul Sémon, Alfréda et Michel Aucouturier, Georges Nivat, José et Geneviève Johannet.

Photographie : Sylvain Maresca