Enfance

« Un accordéon jouait, un rire de femme éclatait, un sabre traînait sur les briques du trottoir, un chien hurlait, mais tous ces bruits inutiles n’étaient que les dernières feuilles du jour fané qui tombaient. »

Cette citation est extraite du récit autobiographique Enfance qui assura la gloire de l’écrivain russe Maxime Gorki. Écrit en 1914, ce premier volume fut suivi deux ans plus tard par En gagnant mon pain. Le cycle s’acheva par Mes universités, paru en 1923. Lire la suite « Enfance »

Au fond du puits

Photo : Sylvain Maresca

Voici quelques vers d’Anne Sylvestre pour compléter mon billet précédent
sur le souvenir de l’enfance :

« L’enfant qui pleure au fond du puits
Sans qu’on veuille l’entendre
L’enfant qui pleure avait promis
De garder le cœur tendre
(…)
L’enfant qui pleure au fond du puits
A rêvé des merveilles
Pour ne pas l’entendre moi je fuis
Me bouchant les oreilles
(…)
L’enfant qui pleure au fond du puits
Possédait les nuages
Se tressait des nattes de pluie
Pour ses dimanches sages
(…)
Nous avons chacun notre puits
Où meurt un enfant tendre
Nous l’entendons pleurer la nuit
Sans jamais bien comprendre »

Écouter l’intégralité de la chanson.

On ne quitte pas l’enfance

« On ne quitte pas l’enfance, on la serre au fond de soi. On ne s’en détache pas, on la refoule. Ce n’est pas un processus d’amélioration qui achemine vers l’adulte, mais la lente sédimentation d’une croûte autour d’un état sensible qui posera toujours le principe de ce que l’on est. »
Patrick Chamoiseau, Antan d’enfance, Paris, Hatier, 1990, p. 78.

On ne quitte pas l’enfance… Elle me paraît pourtant si loin et surtout si terne et grise, comme un long tunnel dont je n’apercevais pas l’issue. J’envie les gens qui parlent de leur enfance avec des yeux éblouis, les ravis de l’enfance, ceux-là mêmes dont on dit parfois qu’ils ne l’ont jamais quittée, qu’ils ont gardé leur « âme d’enfant ». Les poètes en seraient ainsi que beaucoup d’artistes.

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Les airs du temps

En entendant les hommages unanimes rendus à Charles Aznavour à la suite de son décès, j’ai réalisé que je ne l’avais jamais écouté. Bien sûr, comme tout le monde, je connais l’air de quelques-unes de ses chansons les plus célèbres, mais rien de plus. Enfant, dans les années soixante, son nom ne me disait rien. Il fallut la rencontre dans une maison de repos – je devais avoir dix ans – avec une jeune fille qui ne jurait que par Aznavour pour apprendre son existence et entendre un de ses titres. Découverte sans lendemain : je préférai bientôt Claude François et les Beatles.

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La clé est restée sur la porte

Photo : Sylvain Maresca

« Autrefois, personne ne fermait jamais les portes à clé dans toute la ville de Tchoudov. Quand quelqu’un se construisait une maison (…), après la bénédiction de son logis, il remettait la clé à l’église pour l’éternité. De part et d’autre de l’autel étaient accrochées des clés forgées en 1584, avec des dates et des noms gravés qui appartenaient à des familles portant aujourd’hui encore ces noms mentionnés pour la première fois dans des registres paroissiaux de l’époque d’Ivan le Terrible. Il y avait une multitude de clés toutes neuves, étincelantes, et encore davantage de clés noircies par le temps suspendues à des clous dont le mur était criblé depuis le sol jusqu’au plafond ‘Le diable ne se laisse pas arrêter par nos serrures ! disait le prêtre Dmitri Okhotnikov. Et le Seigneur, lui, ne se laisse pas arrêter par le diable !’ »
(Iouri Bouïda, La mouette au sang bleu, Paris, Gallimard, 2015, pp. 48-49 – traduit du russe par Sophie Benech).

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