
J’ai entendu à la radio un commentateur qualifier un événement inédit de « un peu mythique ». Comment peut-on être seulement « un peu mythique » ? Et d’ailleurs comment pourrait-on le savoir dès maintenant ? Le mythe a besoin du temps long de l’Histoire. Il lui faut la répétition des hommages qui en façonnent la légende. Si celui-ci démarre seulement comme « un peu mythique », il sombrera dans l’oubli avant même qu’on en ait un peu parlé. « Un peu mythique » n’est-ce pas « un peu anachronique » ?
Je n’arrive pas à me faire à ce tic de langage, si commun aujourd’hui, qui consiste à associer un terme fort à sa restriction : « un peu unique », « un peu excessif », « un peu raciste »… La liste est sans fin. On a l’impression que les mots puissants effraient autant qu’ils attirent. L’ambition rhétorique voudrait qu’on mobilise le roulement de tambour, l’écho qu’ils déclenchent, à l’appui d’un propos qui cherche à impressionner. Mais aussitôt évoqués, ces absolus du vocabulaire débordent l’intention initiale qui se rétracte, recule et minimise, de peur de finir comme la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf (« La chétive pécore enfla si bien qu’elle creva. »). On voudrait faire choc et on se contente de faire « un peu choc ». Un peu comme si.
Quelle est cette peur des mots ? Pourquoi cet écart, ce remords préventif entre l’intention et sa mise en œuvre ? Le journaliste fait un peu l’écrivain, le responsable politique fait un peu le tribun. De tout un peu, me direz-vous, mais au final, ça fait « un peu rien ». Et encore, puisque « un peu rien » ne veut rien dire, ça fait rien et rien d’autre.
En conclusion, cette débauche d’envolées amollies génère du néant, et pas qu’un peu.
C’est pas faux!!!! , la dernière phrase à TOUT de R. Devos.
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C’est pas faux ou un peu vrai !?
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