Échange de bons procédés

le-corniaud-louis-de-funes-bourvil
Scène du film Le Corniaud (1965). Bourvil : « Elle va marcher beaucoup moins bien, forcément. »

– Bonjour voisin, comment ça va ?

– Je vous croyais partis en vadrouille.

– Ah bon, pourquoi ?

– Votre voiture n’est pas garée devant chez vous comme d’habitude.

– Elle est en panne et pour ne rien arranger, ils ne trouvent pas d’où ça vient. Cette fois, j’ai bien peur que ce soit la fin.

– Quels trémolos ! Ce n’est pas un enterrement, juste une voiture.

– Peut-être, mais je n’ai pas de quoi en racheter une autre. Ça tombe au pire moment.

– Faut dire qu’elle a fait son temps.

– À peine 250 000 kilomètres. J’espérais bien l’emmener jusqu’à 300 000.

– Comment peut-on s’accrocher à ce point à une voiture ?

– On ne s’accroche pas, on l’utilise tant qu’elle roule. Rouler, c’est le job d’une voiture, non ?

– Oui, enfin… avec un minimum de confort et les dernières innovations.

– Les dernières innovations… Qu’y a-t-il eu de décisif depuis l’invention de la roue ?

– À ce compte-là, achète-toi une carriole, ça devrait te suffire !

– Carriole ou pas, on est coincés. D’ailleurs, c’est pour ça que je venais te voir.

– Ah bon ?

– Oui, je voulais te demander si tu pourrais nous prêter ta voiture demain matin ?

– Ma voiture ? Pour quoi faire ?

– Figure-toi que mon fils a trouvé du travail.

– Enfin ! Il était temps.

– Il était temps, il était temps… Le pauvre a fait ce qu’il a pu, mais trouver de l’embauche par les temps qui courent.

– Quand on veut, on peut.

– C’est vite dit, mais bon, on ne va pas discuter de ça.

– Non, ça pourrait dégénérer. Surtout que tu as besoin de moi, à ce que je vois.

– Figure-toi qu’il embauche demain matin à 6 heures, mais à l’autre bout de la ville, comme par un fait exprès. Autant dire qu’à cette heure-là, les bus…

– Et donc tu voudrais l’emmener en voiture ?

– Exactement ! Ce serait l’affaire de vingt minutes, tout au plus. Ta voiture n’aurait même pas le temps de te manquer.

– Remarque, je préfère que ça soit toi qui t’y colles. Parce que pour moi, c’est l’horreur de me lever aux aurores.

– Tu vois, le monde est bien fait : je le conduis là-bas demain matin pendant que toi, tu dors paisiblement dans ton lit.

– Vu comme ça…

– Il n’y a pas d’autre manière d’envisager les choses : tu me prêtes ta voiture et en échange, je te dispense de l’emmener.

– J’aime mieux ça.

– C’est moi qui me lève pendant que toi, tu dors.

– Je l’avoue : mon sommeil, c’est sacré.

– Comme je te comprends. Mais sois rassuré : tu n’as rien à faire, je me charge de tout. C’est bien le moins. Alors, c’est convenu ?

– Ça me gêne presque.

– Mais non, voyons : tu fais ta BA, comme ça tu dormiras du sommeil du juste, et moi je me tape la corvée.

– Je te plains.

– Non, non, c’est normal.

– Vraiment, ça me soulage.

– A la bonne heure. Alors, tope là, camarade.

– Tiens voilà les clés.

– Bonne idée. Il ne manquerait plus que tu sois obligé de te lever demain matin pour me les confier. Je le répète : tu peux dormir tranquille, tu n’entendras même pas le moteur démarrer.

– Merci. J’apprécie cette attention.

– Non, c’est moi qui te remercie.

– Si, si, merci.

– Ce n’est rien, juste un échange de bons procédés.

3 réflexions sur “Échange de bons procédés

  1. Euh, j’espère que ce voisin qui fait sa BA ne va pas récupérer sa p’tite auto dans l’état de la photo ci-dessus , …. parce que .. forcément, elle va moins bien marcher 😉 Nicole S

    J’aime

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.