
Voici un joli mot aux résonances mystérieuses. Rien à voir avec le caniveau ou la manivelle, encore moins avec les galipettes. Il désigne en fait une clôture composée de lattes de bois que relient des tours de fil de fer galvanisé. L’espace entre les lattes est variable et ainsi la clôture plus ou moins perméable. On s’en sert particulièrement pour délimiter et stabiliser les dunes littorales. Traditionnellement, les lattes sont taillées à la main dans du châtaignier.
On en connaît également une version plus moderne et manufacturée, autrement dénommée « barrière Vauban » : il s’agit des barrières métalliques mobiles que l’on déploie pour interdire l’accès d’un espace public, canaliser les foules ou les maintenir à distance.
D’où vient ce terme qui fleure bon le Moyen-Age ?
Dans son célèbre dictionnaire du milieu du XIXᵉ siècle, Littré définit la ganivelle comme « une douve pour tonneau, dite aussi rebut, dont la largeur est réduite ». Faute de remplir déjà sa fonction de garde-fou, nous voilà renvoyés à la fabrication des tonneaux, à l’alcool qu’ils contiennent et au risque de finir dans le caniveau.
L’Annuaire des Eaux-et-Forêts de 1873 désigne par ce mot des « fonds rebuts ». On se rapproche des lattes de nos clôtures, taillées dans des bois trop minces pour servir à autre chose.
En ancien français, cette connotation de rebut se trouvait déjà dans le mot « ganivet », qui qualifiait un avorton :
Il seroit bon qu’un tas de ganiveaux
Et ceulx qui sont de trop mal heure nez
Bien replantez fussent comme poireaux
Pour revenir plus bons et façonnez.
Une « ganivette » étant un couteau et le « ganivetier » celui qui vendait ou maniait les couteaux, on en revient à notre définition initiale, à savoir celle d’un assemblage de lattes taillées au couteau dans du rebut de bois.
Notre vocabulaire a conservé la mémoire de cet usage économe qui de surcroît se révèle plus durable puisque les lattes taillées manuellement durent plus longtemps que les lattes sciées.
Ou la poésie au service du développement durable !
Enrichissante cette lecture!
Merci
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Quelle recherche ! Tout ça me rappelle les belles recherches et interprétations toponymiques sur ces merveilleuses cartes de l’IGN…Bravo.
Laurent
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Merci beaucoup. Très instructif. Bravo pour tous ces détails
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